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Le Professeur Bernard Hanseeuw était intervenu lors du colloque de janvier 2024, avec un sujet s’intitulant : « MCL: Pronostic et traitements »:
Actuellement il n’y a pas de médicament curatif permettant de guérir de la MCL. Néanmoins certains traitements peuvent soulager les symptômes spécifiques (cognition, troubles moteurs, hallucinations, sommeil, humeur). Comme ces symptômes varient d’un malade à l’autre et au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, le traitement variera aussi. Certains traitements administrés pour un symptôme peuvent en aggraver d’autres.
La première chose à faire est de trouver un neurologue ou un médecin qui connait bien la MCL. Celui-ci planifiera des rendez-vous réguliers, l’occasion de faire état de l’évolution, répondre aux questions et adapter le traitement en fonction des besoins et des symptômes les plus envahissants pour le malade (et les proches directs).
En préparation de chaque rendez-vous médical, voici plusieurs recommandations:
- faites la liste complète et précise des médicaments que le malade prend (nom, posologie, dosage,…) et apportez – la lors du rendez-vous. Cela vaut aussi pour les hospitalisations ou prises en charge aux urgences
- observez et documentez soigneusement les effets des médicaments
- entre chaque rendez-vous médical, tenez un « carnet de bord » de l’expérience du quotidien : par ex. chutes, perturbations liées au sommeil vécues (nombre de levers nocturnes, temps de somnolence diurne) …
Partagez la liste des médicaments et les informations rassemblées avec le médecin. Profitez – en pour vous informer sur l’évolution possible de la maladie, ce qui vous permettra de mieux reconnaître les symptômes et de vous y préparer.
LEWY BODY DEMENTIA ASSOCIATION (LBDA) a mis au point un « suivi mensuel des symptômes » utile à compléter de rdv médical en rdv médical :
Quelques points d’attention
Seul le neurologue ou le médecin traitant qui connaît la MCL est apte à prescrire les médicament appropriés : jamais d’automédication ! Consultez le neurologue avant toute modification de traitement et respectez strictement la prescription médicale (ex : dosage)
Le malade présente une hypersensibilité aux neuroleptiques qui risquent d’aggraver les symptômes de la maladie. Les neuroleptiques, et en particulier les neuroleptiques de première génération sont à proscrire car ils peuvent entraîner :
- des chutes (hypotension orthostatique),
- une aggravation des troubles cognitifs et de la confusion,
- des délires et hallucinations accrues,
- un syndrome malin des neuroleptiques (potentiellement mortel) : fièvre, rigidité, trouble de la conscience, instabilité tensionnelle…
- une aggravation du syndrome parkinsonien,
Prendre soin d’une personne atteinte de MCL : les clés au quotidien.
La MCL s’accompagne de nombreux défis physiques, cognitifs et émotionnels :
TRAITEMENT DES TROUBLES COGNITIFS
Traitement médicamenteux
- Les médicaments comme le donépézil ou la rivastigmine (inhibiteurs de la cholinestérase) peuvent améliorer l’attention, la mémoire et limiter les fluctuations cognitives.
- Ils sont souvent utilisés en première intention pour ralentir le déclin cognitif.
- Attention: peut être mal supporté car troubles digestifs
- Attention: pas chez les patients avec d’importants troubles cardiaques (bradycardie…), donc avis cardiologue
Conseils pratiques
- soyez patient : laissez le temps au malade de s’exprimer
- aidez à retrouver le fil : contexte, indices visuels ou verbaux
- si la conversation devient tendue, utilisez la technique du coq à l’âne pour détourner l’attention
- privilégiez les consignes simples et uniques, une tâche à la fois
- créez des routines visuelles (ex : toujours poser lunettes au même endroit)
- simplifiez l’environnement : peu encombré, contrastes de couleur pour se repérer
- travaillez la parole dans le plaisir (balades, observations…
TRAITEMENT DES TROUBLES MOTEURS
Traitement médicamenteux
Les symptômes parkinsoniens (lenteur, raideur, tremblements) peuvent être soulagés par la lévodopa (Prolopa). Elle améliore les capacités motrices mais peut augmenter les symptômes psychotiques.
Ainsi, un patient chez qui on va « diagnostiquer » une maladie de Parkinson , et chez lequel on va débuter par 150mg puis 300,500,800 et parfois jusqu’à plus de 2gr par jour…s’il s’agit d’une MCL donner ne serait-ce que 1000mg de levodopa c’est forcément aller vers des hallucinations, vers des fluctuations avec confusion, vers une aggravation cognitive importante.
Ne pas donner si pas de symptômes moteurs!
Prévention :
- kinésithérapie : lutte contre la rigidité, apprend à prévenir et gérer les chutes
- activité physique adaptée : marche douce, danse, jeux de ballon…
- rollator pour sécuriser les déplacements
- encouragez l’autonomie : couper les légumes, s’habiller, se brosser les dents…
- maintien de la masse musculaire : alimentation équilibrée + compléments protéinés si besoin
- aménagement du domicile avec un ergothérapeute : supprimer les tapis, installer rampes, tapis antidérapants, guides lumineux…
- contactez votre mutuelle ou service social pour bénéficier de certains services gratuitement
TRAITEMENT DES TROUBLES DU SOMMEIL PARADOXAL
Traitement médicamenteux
La mélatonine est utile en cas de troubles du rythme veille – sommeil ou de rêves agités (souvent très vivaces dans la MCL). Elle peut être administrée aux malades à corps de Lewy une heure avant le coucher (préparation magistrale -pas sous forme « retard »- 3 mg puis 6mg et max 12 mg/jour)
Clonazepam (= Rivotril) à commencer par une goutte au coucher et augmenter progressivement. Risque de forte sédation car psychotrope = benzodiazépine
Conseils sommeil :
- maintenir un rythme régulier : coucher/lever à heure fixe
- instaurer un rituel apaisant (lecture, lumière tamisée…),diminution à l’exposition lumineuse progressive le soir
- activité physique et sociale en journée
- exposition à la lumière du matin (30 min) → favorise l’endormissement
- luminothérapie possible si pas de contre indication et bien tolérée
TRAITEMENT DES HALLUCINATIONS ET DES IDÉES DÉLIRANTES
Traitement médicamenteux
Les hallucinations visuelles sont fréquentes, mais ne sont traitées que si elles deviennent envahissantes ou angoissantes :
- En cas d’hallucination critiquée et pas envahissantes ou gênantes « Je sais que ce n’est pas réel, mais je le vois quand même », le patient reconnaît que ce n’est pas réel, même s’il le perçoit : on ne traite pas
- Si les hallucinations sont peu envahissantes mais sans délire associé (pas d’agressivité ou de paranoïa) :
Par exemple, une patiente dit calmement : « Il y a un petit garçon assis sur le fauteuil depuis ce matin. Il ne parle pas, mais je le vois bien. »
👁️ Hallucination visuelle : la patiente voit un enfant qui n’existe pas.
❌ Non critiquée : elle est persuadée qu’il est vraiment là.
💬 Pas de délire associé : elle ne développe aucune idée fausse complexe ou interprétative autour de cette vision. Elle ne dit pas que cet enfant est un espion, un mort, ou qu’il est dangereux.
Remarque : Ce type d’hallucination peut être tranquille, persistante, et acceptée comme réelle, sans angoisse ni scénario délirant.
On traitera avec donepezil ou rivastigmine
- En cas d’hallucinations non critiquées avec délire:
Par exemple, un patient affirme : « Je vois des hommes en noir autour de la maison. Ce sont des agents secrets, ils veulent m’enlever parce que je connais des secrets d’État. »
- 👁️ Hallucination visuelle : il voit des personnes qui ne sont pas là.
- ❌ Non critiquée : il croit fermement que ces personnes sont réellement présentes.
- 💭 Avec délire : il construit un scénario délirant autour de l’hallucination (persécution, conspiration, espionnage).
Ici, l’hallucination est intégrée dans un système délirant, ce qui rend l’état plus complexe et potentiellement dangereux.
On privilégie la clozapine (Leponex) ou la quétiapine (Seroquel), deux neuroleptiques dits atypiques.
La clozapine est souvent plus efficace, mais nécessite une surveillance biologique étroite (prise de sang régulière , toutes les semaines pendant 18 semaines puis 1 fois par mois) en raison du risque d’agranulocytose (baisse sévère des globules blancs)
Mesures utiles:
- bonne luminosité dans toutes les pièces
- adapter la vue : lunettes correctrices si besoin
- supprimer les objets ambigus : miroirs, vêtements posés sur chaises…
TRAITEMENT DE LA DÉPRESSION
Traitement médicamenteux
SSRI (ex. : Sertraline),
Éviter le citalopram qui entraine une aggravation des troubles cognitifs sans amélioration du moral
Approches non médicamenteuses :
- psychothérapie individuelle : pour aider à surmonter angoisses et pertes de motivation
- thérapies d’expression : art-thérapie, musicothérapie, aromathérapie, balnéothérapie…
- groupes de parole : pour retrouver un sentiment de soutien
- présence empathique : l’attention bienveillante des proches est essentielle
Prudence avec les benzodiazépines!
Utilisées pour leur action anxiolytique, les benzodiazépines peuvent provoquer brutalement une perte cognitive, des hallucinations et rendre paradoxalement plus anxieux.
⚠️ Neuroleptiques classiques : à éviter absolument
En résumé
- combiner traitements et accompagnement personnalisé
- favoriser l’autonomie sans forcer
- adapter l’environnement pour plus de sécurité
- prendre soin du corps… et de l’esprit
Vous êtes aidant ? N’hésitez pas à demander de l’aide. Des professionnels, des groupes de soutien ou des services sociaux peuvent vous accompagner. Vous n’êtes pas seul.
La liste des symptômes repris dans cette fiche informative est loin d’être exhaustive.
Les informations médicamenteuses sont inspirées du travail du Dr Frédéric Blanc (Hôpital de Strasbourg, en France).